Clarisse, gardienne du refuge de la Pointe Percée






Clarisse BINETRUY
Gardienne du refuge de la Pointe Percée
"Une vie hors du commun, hors du temps, comme un voyage"
Gardienne du refuge de la Pointe Percée depuis juin 2024, Clarisse a eu plusieurs vies avant de consacrer son existence à la montagne. Profondément liée à la nature, aux cimes et au partage, cette ancienne enseignante s'épanouit dans le métier de gardien où "tout est tellement fort".
A 38 ans, Clarisse Binetruy vient de prendre la gestion du refuge de la Pointe Percée, dans le massif des Aravis. Un aboutissement logique dans le parcours déjà dense de cette native de Franche-Comté qui réside depuis plusieurs années à Doussard, au sud du lac d'Annecy. "J'ai commencé à travailler en refuge en 2010 pendant l'été, aux Conscrits, avec Christine Mattel", raconte Clarisse. "C'était une formidable expérience. Puis j'ai voulu découvrir un autre refuge et j'ai postulé à Albert 1er où j'ai fait cinq saisons et noué là aussi de belles amitiés avec l'équipe." Le reste de l'année, Clarisse Binetruy est animatrice nature dans le pays du Mont-Blanc. "Dès ma première saison, j'ai eu un énorme coup de cœur pour la vie en refuge. Je voulais me reconvertir, mais ma famille n'était pas enthousiaste. Alors je suis retournée à la fac et j'ai passé le CAPES d'anglais en 2013."
Changement de vie
Jusqu'en 2020, Clarisse est donc pluri-active : enseignante durant l'année scolaire, aide-gardienne de refuge pendant l'été. Une vie de contrastes qui lui plaît, mais qui n'assouvit pas l'un des projets qui lui tient à cœur : partir vivre à l'étranger. "En 2020, je suis partie en Islande où j'ai d'abord travaillé dans une exploitation agricole puis dans le lodge d'un ami guide où j'ai retrouvé ce qui caractérise un refuge : l'isolement, des rythmes de travail soutenus, un milieu montagnard, une sorte d'entre-soi…", évoque Clarisse qui, rentrée en France, obtient son Diplôme Universitaire de Gardien de refuge de montagne en mai 2023 et abandonne les salles de classe. "Lorsque j'ai vu l'offre pour le gardiennage du refuge de Gramusset au printemps 2024, j'ai immédiatement postulé car tout me convient ici : la proximité de mon domicile, une clientèle très diverse, un bâtiment tout neuf, un accès facile, une bi-saisonnalité contrastée avec un public varié en été et des montagnards aguerris en hiver."






Un refuge entièrement rénové
Le refuge de la Pierre Percée a donc fait peau totalement neuve à son ouverture en juin 2024 avec un bâtiment entièrement rénové et une nouvelle équipe dirigée par Clarisse Binetruy. Lumineux et chaleureux, l'édifice recèle 6 dortoirs de 4 à 14 places pour un total de 49 couchages. "Tout est très fonctionnel et confortable. Une partie du refuge historique de 1928 a été réhabilité et compte deux dortoirs très agréables », détaille Clarisse. « Le refuge possède deux toilettes sèches et deux en eau, ainsi que deux douches que j'ai décidé de ne pas mettre en service pour protéger les ressources et faire de la pédagogie. Je pense que c'est notre rôle, en tant que gardien, de sensibiliser le public aux questions des ressources et de l'environnement." S'il faut se contenter de lavabos pour se débarbouiller, le confort est toutefois au rendez-vous dans ce bâtiment idéalement perché, telle une vigie ouvrant sur la chaîne du Bargy et le pic du Jalouvre.
Des choix qui ont du sens
"Côté restauration, tout est fait maison. Je sélectionne des producteurs locaux ou avec lesquels j'ai une histoire particulière", précise Clarisse qui cherche résolument du sens dans tout ce qu'elle entreprend. La viande provient de la maison haut-savoyarde Baud, les fruits et légumes sont issus du Faucigny, le beurre et le Comté sont produits dans une coopérative bio de Franche-Comté, le pain est soit fait maison soit façonné par un boulanger bio de Doussard, et les sirops viennent de la maison Rième à Morteau. "Ma grand-mère avait un bar et s'approvisionnait chez Rième. J'ai grandi avec leurs sirops", s'amuse Clarisse qui est épaulée par une équipe de quatre aide-gardiens, notamment en cuisine. "Nous aimons mélanger les cultures et proposer des plats variés. Au menu : des soupes préparées avec des légumes frais, du tajine aux pruneaux, de la potée de choux, des cookies au sarrasin, des éclairs au chocolat, des tartes aux fruits de saison… mais pas forcément aux myrtilles", ajoute Clarisse.
Sensibiliser et éduquer
Si le refuge se veut autonome en termes d'énergie et de ressources (deux citernes d'eau, des panneaux photovoltaïques et des batteries, une chaudière à pellets, des panneaux thermiques, un poêle à bois), Clarisse veille à déployer une démarche aussi vertueuse que possible. Les déchets sont compostés dès que possible et triés avant d'être descendus dans la vallée par hélicoptère. "Seul le verre descend à dos d'homme, c'est une habitude qui a été prise ici depuis longtemps", explique Clarisse. "Je sensibilise beaucoup les enfants et les adultes à ces problématiques. Parfois, certaines personnes nous proposent même de descendre des déchets." Facilement accessible, le refuge de Gramusset accueille de nombreux groupes scolaires et des familles, un public duquel Clarisse se sent particulièrement proche et peut réinvestir son expérience d'enseignante. "Je souhaite développer des projets pédagogiques, mais aussi des animations comme des lectures de poèmes, des sensibilisations à l'environnement, ou encore des concerts. Les choses se mettent en place progressivement."
La passion de la montagne et du partage
Il faut dire que le travail ne manque pas pour l'équipe qui s'est installée dans ce décor minéral il y quelques semaines à peine. "Les premiers retours que nous avons sont très positifs. Nous faisons les choses à notre façon et cela semble plaire, y compris aux locaux. C'est vraiment satisfaisant." Passionnée par son métier, aussi difficile soit-il, Clarisse aime plus que tout au monde cette vie d'altitude. "C'est une vie hors du commun, hors du monde, comme un voyage. C'est inracontable. Nous partageons des coups durs et de grands moments de joie. Tout est tellement fort ! Les liens sont exacerbés là-haut. Nous vivons dans un milieu tellement beau. Chaque jour est différent et identique à la fois. Le partage avec autrui est aussi l'un des aspects du métier qui me paraît essentiel tant il est important dans les temps tourmentés et individualistes actuels", confie Clarisse. "Il y a sans doute une part de fuite aussi. Le monde d'en bas paraît hostile, alors on se réfugie là-haut, où l'on essaie d'apporter sa pierre à l'édifice. En tout cas, je suis profondément heureuse d'être ici."
Pour réserver
Période de gardiennage
Du 20 janvier jusqu'à fin mars
De juin à septembre (octobre sur réservation)
Activités praticables autour du refuge
Randonnée
Ski de randonnée
Ski alpinisme
Trail
Alpinisme
Escalade
Ce refuge fait partie du programme Refuges en famille
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