Anne Monnier, bénévole au Club alpin français Grenoble Oisans : "Le livre d'or est le patrimoine écrit et graphique d'un refuge"
Bénévole au Club alpin Grenoble Oisans, Anne Monnier est référente pour le projet des livres d'or de l'Isère. Un engagement passionné pour le patrimoine écrit des refuges qui évoque la longue histoire de ces bâtiments d'altitude.






C'est au cours d'une banale sortie de ski de randonnée qu'Anne Monnier s'est lancée dans le bénévolat. Membre du Club alpin Grenoble Oisans depuis 2018, l'Iséroise entend un membre du groupe évoquer l'appel aux bonnes volontés pour la gestion des refuges. "Le projet m'a tout de suite parlé", raconte Anne. "N'ayant aucune compétence technique – je travaillais dans le marketing et les ventes avant d'être à la retraite – j'ai donc aidé aux travaux liés à la vie des refuges." Anne devient donc membre de la commission Refuges de l'Isère qui contribue à la gestion des 9 refuges qui dépendent du club grenoblois (Châtelleret, Font Turbat, La Lavey, La Pilatte, La Pra, Promontoire, Temple Écrins, La Bérarde et l'ancien refuge du Carrelet). "Je fais partie d'une génération où l'on a à cœur de rendre à un club ce qu'il nous a donné. Au-delà de cela, le bénévolat est un vrai plaisir, surtout que la partie refuges implique un travail d'équipe, une découverte des coulisses et le passage du statut de simple consommateur à celui d'acteur conscient de la complexité d'un bâtiment d'altitude."
Redonner vie aux livres d'or
Intégrée à la Commission Refuges du club en 2020, Anne découvre qu'une collecte des livres d'or a déjà commencé afin de les restaurer puis les replacer dans leur bâtisse d'origine. Elle s'engage très vite dans le projet et en devient bientôt la référente. "Le livre d'or est le patrimoine écrit et graphique d'un refuge. C'est un pan de l'histoire qui est à la fois émouvant et passionnant." Si le projet originel était de donner une seconde jeunesse aux livres d'or en les confiant à un restaurateur, le coût s'est vite révélé dissuasif. L'idée de les dupliquer a alors émergé, lui aussi trop onéreux. Un long travail de photographie des 85 livres récupérés dans les neuf refuges du club s'est donc mis en place pour immortaliser malgré tout les documents. Aujourd'hui, plus de 15 000 photos ont été réalisées par une équipe de bénévoles unie autour d'un objectif : extraire les pépites de ces ouvrages. "Chaque personne consulte les livres qui lui sont confiés et choisit ce qui lui semble intéressant, qu'il s'agisse d'anecdotes, de dessins, de témoignages…", explique Anne Monnier. Un cahier est ensuite réalisé pour chaque refuge, un peu comme un best of réintégré dans les lieux. "Un premier cahier a été imprimé pour le centenaire du refuge de Font Turbat. Voyant notre projet, la Fédération nous dit qu'elle nous accompagnerait pour les prochains cahiers." Le deuxième ouvrage consacré au Carrelet est d'ores et déjà sorti des presses et d'autres suivront. "Par la suite, nous voulons mettre en ligne les documents et éditer Le Petit Livre d'Or qui reprendra l'ensemble des pépites de tous les refuges. Nous n'abandonnons pas l'idée de la duplication : nous cherchons des fonds et un moyen d'impression moins onéreux."
Le témoignage précieux de l'histoire montagnarde
Ce projet constitue un travail de longue haleine, d'autant plus que les livres d'or sont souvent très anciens et parfois peu lisibles. "J'ai dépouillé beaucoup d'entre eux. La matière qu'ils recèlent mériterait d'être étudiée, pourquoi pas par des instituts de géographie alpine, car ils témoignent de 150 ans d'activité montagnarde", estime Anne. Apparus quelques années après la création du club alpin, les livres d'or racontent à la fois de petites histoires et la grande Histoire, celle des premières ascensions, de la fréquentation étrangère des Alpes françaises, des clubs de montagne, des ancêtres de l'actuelle UCPA, de l'essor des loisirs en famille, mais aussi de la surfréquentation, de l'évolution des pratiques et du réchauffement climatique. Ce travail permet aussi de saluer l'activité des gardiens et des guides. La pertinence de ce projet ne fait aucun doute, comme l'illustrent les deux expositions présentées à Saint-Christophe-en-Oisans, l'un dans la salle annexe de l'hôtel-restaurant La Cordée, l'autre au musée Mémoires d'alpinismes. Une véritable réussite du bénévolat qui profite à tous et contribue à la mémoire collective. Sans l'investissement des bénévoles, l'héritage précieux de ces livres d'or se perdrait. "Il nous manque quelques ouvrages, que nous aimerions beaucoup retrouver pour les unir à ceux que nous possédons. Si quelqu'un retrouve un livre au fond d'un placard, nous sommes preneurs !", lance Anne Monnier.