Portraits de printemps #1 Alexandra Genesty






Alexandra Genesty : " Se sentir utile à travers le regard de l'autre."
Nous débutons une série de portraits de printemps, consacrée aux bénévoles et salariés qui font vivre la FFCAM. Premier de la série, Alexandra Genesty, membre du comité directeur fédéral, adhérente au Club alpin de Toulouse, qui coordonne le "Pôle ressources public éloigné" de notre fédération.
Le souci de l’autre est une nature profonde pour Alexandra Genesty, un réflexe qui semble marquer toute sa vie. Née à Paris, elle grandit à Toulon où, après avoir suivi des études d’ébénisterie, de vernissage et de facture d’orgue, elle se tourne vers le secteur éducatif. Cette sensibilité est liée à son histoire personnelle : "des amis à mes parents ont un enfant en situation de polyhandicap : lors de nos vacances, je m’occupais beaucoup de lui et arrivais à lui faire faire des choses que ses parents ou les miens n’arrivaient pas à obtenir. Nous sommes encore très proches. Ma connaissance des institutions provient des fonctions de mes parents au sein de la DDASS…"
Alexandra habite aujourd’hui Toulouse, où elle travaille comme monitrice éducatrice dans le polyhandicap au sein d’une maison d’accueil spécialisée, où elle oeuvre beaucoup pour l’inclusion, accompagnant dans tous les actes de la vie quotidienne des personnes dépendantes et montant des projets d’activités en lien avec le projet d’établissement.
La montagne est une passion de longue date pour Alexandra, qui pratique randonnée, escalade, via-ferrata, trek et ski alpin... "J’aime les grands espaces, ce sentiment de liberté et de n’être qu’une petite chose face à la nature…" Adhérente aujourd’hui du Club alpin de Toulouse, elle a géré pendant plusieurs années la section escalade et créé en 2006 la section "HandiCaf", sur les sollicitations de Xavier Basseras, alors président du club. La première sortie a été réalisée en janvier 2007 : un week-end avec des jeunes en situation de polyhandicap, mené en partenariat avec l’association Y Arrivarem 31 (où Alexandra est également investie). Pour faire tourner une section "HandiCaf" au sein d’un club, explique-t-elle, "il me fallait des bénévoles qui s’impliquent un week-end par mois car le projet était de proposer aux jeunes une pratique régulière de la montagne avec un suivi de chacun en lien avec les éducateurs de leurs structures. A ce jour, nous sommes sept bénévoles pour proposer dix week-ends et un camp d’une semaine. Au-delà de l’accompagnement de ces jeunes, nous avons offert à leurs familles (parents et fratrie) un sas de décompression leur permettant de se retrouver sans la contrainte du handicap."
Alexandra est élue au comité directeur fédéral en 2014, lors de l’Assemblée Générale de Nancy. Après avoir secondé Luc Jourjon pendant quatre ans à la tête du "Pôle ressource public éloigné", elle en prend la tête en 2018 (elle le gère en lien avec Lilia Theurier, du service activités fédéral). Son rôle est d’accompagner les clubs dans la création d’une section, de valider les appels à projets, d’orienter, de conseiller et de valoriser. « Le Pôle n’est pas destiné qu’aux seules personnes en situation de handicap. Ses missions vont vers toutes les personnes éloignées de la pratique sportive, que ce soit pour des raisons économiques, sociales, ou en lien avec leur santé. Sans les compétences acquises avec mon métier, je n’aurais pas monté de projet en direction de ce public...»
27 clubs ont déclaré des projets pour 2019/2020 au sein du Pôle, dont le développement se poursuit. "J’aimerais organiser un rassemblement national autour du thème "La montagne pour tous" dans les années à venir. Cela nous placerait parmi les acteurs de l’inclusion par le sport…" Parmi les actions qu’elle encadre, Alexandra se souvient notamment d’un séjour réalisé au Maroc en avril 2019. "Nous sommes partis dix jours avec onze jeunes et avons effectué sept jours en itinérance dans la vallée d’Aït Bourgmez. La plupart des jeunes n’avait jamais pris l’avion et encore moins fait de l’itinérance. Il m’a fallu un an pour tout organiser et pour finaliser j’ai été faire du repérage sur place. Nous ne savions pas comment les jeunes allaient réagir face à la découverte d’un nouveau pays, de sa culture, sa cuisine, sa langue… Ils ont fait preuve d’une grande ouverture d’esprit, allant à la rencontre des villageois, posant beaucoup de questions sur le mode de vie des gens de montagne, faisant un parallèle avec notre culture. De notre côté, nous avons vu que l’itinérance n’était pas faite pour eux : changer de lieu chaque jour pour dormir les déstabilisaient, même si nous leur montrions le chemin sur une carte. Nous repartirons à l’aventure, mais sous une forme différente, avec un point de chute fixe et une nuit en refuge…"
Alexandra travaille actuellement sur le prochain camp, qui aura peut-être lieu dans les Carpates. Dans son action bénévole, elle souhaite être "créatrice de plaisir et se sentir utile à travers le regard de l’autre." La montagne, d’après elle, à travers les actions du "Pôle ressource public éloigné", permet aux personnes concernées de pratiquer, d’être comme tout le monde. La montagne participe au maintien de leurs acquis, à leur redonner confiance en eux mais aussi en l’autre. Pour les personnes qui sont en institution, cela leur permet de faire une pause. Le milieu institutionnel peut être très étouffant avec des soins et prises en charge souvent lourdes. "Durant un week-end, une journée, ils sont à l’extérieur sans professionnel qui les jugeront sur leur progrès. Ils sont juste eux et surtout comme tout le monde."