Récits d'ascension






Patrice Glairon-Rappaz
"Golden Gate", est de mon point de vue une très belle voie, soutenue mais jamais extrême.
Il faut bien sûr mettre les cotations de coté, comme il est de coutume au Yosemite, et se méfier des longueurs d'apparence facile sur le topo... mais passé le fameux "Monster Offwidch"qui laisse des traces !!!... l'escalade devient plus classique et le plus souvent extérieure, même si les longueurs sont souvent ponctuées de pas de bloc plus ou moins retors.
Nous sommes évidemment partis dans le but d'enchainer un maximum de longueurs.... Faire du libre étant le leitmotiv !
Si quasiment tout a été fait en libre, sauf quelques passages où nous ne nous sommes pas acharnés, nous avons composé avec notre expérience et notre fatigue en gérant au mieux sur la durée, histoire d'en avoir toujours un peu sous le pied en cas d'imprévu... Au final, les longueurs dures n'ont pas été enchainées, mais quasiment tout le reste l'a été par au moins un des membres de la cordée, soit plus de 30 longueurs sur environ 40...
Pour moi les longueurs marquantes sont: Hollow Flake, The Ear, le Monster et le 6b avant One move.
Les plus belles : La grande longueur derrière "El Cap Spire", One move, Golden Desert et Razor Blade.
→ Un formidable esprit d'équipe s'est installé au fil du séjour et je n'avais jamais imaginé vivre une telle ambiance dans un mur
Le fait de gravir des voies parallèles n'y étant pas pour rien, la situation a fait qu'on se serait parfois cru en couenne, perchés là haut à 800 mètres du sol, chacun y allait de son essai et de son combat, encouragé par le reste du team.
Martial dirait: « Un truc de ouf ! »
On en oubliait parfois où l'on se trouvait, la pression, le vide, les protections clairsemées...
Alternant doutes et satisfactions, beaux taquets, gros combats et renfougnes de la mort, les journées se sont succédées dans la bonne humeur.
Un rituel bien établi jusqu'au moment où le calme revenu on se retrouvait sur notre perchoir chaque soir à la nuit tombante, exténués, les pieds meurtris, assis au bord du portaledge, le regard perdu et la tête pleine de ces condensés de vie vécus dans la journée.
De belles journées de plein air comme on dit...
A "Tower to the People", trois portaledges les uns à cotés des autres faisaient penser aux photos surréalistes que l'on voit dans les livres avec un imbroglio de matos au relais... un véritable foutoir pendu au milieu de nul part en plein vide.
Comme dirait Martial :"...."
Lorsque l'on redescend d'El Cap, que tout s'est bien passé et que l'on est de retour dans la vallée, fatigué, soulagé, heureux, on savoure l'instant...
La trilogie, bonne bouffe, douche et bon lit !
...Puis avec quelques jours de recul, on a l'impression d'avoir fait une escalade un peu longue et laborieuse certes, mais que ce n'était pas si compliqué et que toutes ces précautions et tous ces préparatifs si laborieux n'étais pas si nécessaires...
Ouais,ouais,ouais...
Pour ma part, toutes les ascensions que j'ai vécues sur El Capitan restent des souvenirs indélébiles de ma vie de grimpeur...
Cette session ne dérogera pas à la règle !






Nico et Martial
Nous sommes partis 7j dans la voie en essayant de suivre la redoutable cordée Diego / Babar. Faute de niveau, nous avons du taper plus d’essais dans les longueurs clefs mais c’était super motivant d’essayer de les imiter. Nous avons tout donné, et au final, seul la longueur de la Roof Traverse manquera à notre cordée. Nous sommes donc quand même très content de nous et gardons un souvenir impérissable de ce long voyage en libre dans El cap.
Babar
Tout dans ce trip restera dans ma mémoire. Les paysages, les fissures, les dièdres, les bivouacs, la motivation, la frousse, la fatigue, les odeurs, mais avant tout, c’est l’alchimie entre les personnes.
On n’a plus envie de revenir à la vraie vie….On aurait du rester au YOS !!!
Diego
Parti pour une première expérience sur El Cap, j’envisageais ce trip comme un galop d’essai et d’apprentissage pour une éventuelle prochaine fois. En effet, dès la première voie essayé, un misérable 6b sur le papier, nous prenons claque énorme dans ce style fissure cheminée si particulier. La préparation dans la vallée écourtée par le mauvais temps se résume à 2 journées de couennes puis c’est l’entame des préparatifs et les prises de têtes sur les stratégies à adopter. Quand enfin vient le moment de grimper après tous ces préparatifs laborieux, comme d’habitude, tous ces instants de galère s’oublient sur le champ, on s’immerge dans la face, on l’apprivoise petit à petit.
Chaque longueur sera un rude combat avec comme mot d’ordre « Faut rien lâcher ». La cordée prend une dimension décuplée au fil des jours. Sortis du mur avec l’impression d’avoir accomplis un rite, ça y est, on fait partie de la tribue !
Au-delà de l’escalade, nous avons vécu des choses très fortes entre amis, vivant à l’unisson pour la même chose.