Philippe Latapie : « Licencié, bénévole ou responsable, chacun a des points des vue, des compétences et des expertises à partager »
Philippe Latapie est membre du Club alpin angoumois, en Charente. Depuis une quinzaine d'années, il a occupé diverses responsabilités au sein des équipes dirigeantes de la Fédération. Aujourd'hui délégué à la Présidence et chargé de mission auprès du bureau fédéral, il est aux manettes de ce deuxième congrès organisé à Pau les 10 et 11 novembre prochains.
Que représente ce congrès pour la FFCAM ?






P.L : Il s'agit d'un moment fédéral fort, positionné dans nos statuts à mi-mandat, qui donne à tous les licenciés et bénévoles la possibilité de prendre part aux débats et de faire entendre leur voix sur les questions qui animent notre association. L'avenir des refuges, l'évolution de nos pratiques, les enjeux environnementaux, la place du bénévolat et des jeunes, le rôle des femmes, l'offre de formation, les services à renforcer et bien d'autres sujets font l'objet des 23 ateliers retenus par notre comité directeur, auxquels chaque licencié peut participer. Car chacun, chacune quelle que soit son implication comme simple licencié, bénévole ou responsable, doit pouvoir partager ses points de vue, ses compétences et expertises. De ces deux jours d'échanges résultera une synthèse, remise à l'Assemblée générale et mise à disposition des licenciés. Ce document est important car il servira de matériau (analyses, pistes d'action, préconisations) pour l'élaboration du ou des projets au cap de la prochaine olympiade.
Après « Montagnes en conscience », qui était le thème du congrès de Grenoble, celui de Pau s'intitule « Montagnes en transition », pourquoi ce glissement ?
P.L : Aujourd'hui, nous parlons plus volontiers de transition sans doute parce que les esprits ont évolué et que nous sommes tous convaincus de la nécessité de s'adapter. La transition à laquelle nous sommes contraints est d'abord liée au changement climatique. Mais pas seulement, elle concerne surtout tous les acteurs de l'écosystème montagnard – collectivités, résidents, entreprises, visiteurs, etc. –, dont fait partie la fédération avec l'ensemble de ses pratiquants. Pour nous, la transition, c'est d'abord celle qui questionne nos pratiques : nous constatons tous les effets du réchauffement sur les montagnes mais il nous faut aussi avec notre parc de refuges offrir des conditions d'hébergement en cohérence avec les nouveaux enjeux (l'itinérance, l'éco tourisme) et s'assurer de la viabilité de notre propre modèle économique. Le plan de rénovation engagé a déjà porté ses fruits mais il est sans cesse confronté aux évolutions sociologiques, économiques, écologiques et techniques, qui nous poussent à nous adapter aux logiques émergentes chez nos partenaires, nos prestataires. Vis-à-vis de notre leitmotiv – « rendre la montagne et les sports de montagne accessibles au plus grand nombre » –, nous devons élever notre niveau d'exigence, tant au niveau fédéral que jusqu'aux offres de nos associations, clubs et comités. Comment, alors, remplir cette mission en harmonie avec l'écosystème montagnard ? Quelle démarche adopter pour la rendre audible et compréhensible ? Autant de sujets qui seront présentés à ce congrès lors des tables rondes et des ateliers.
Justement, comment s'est construit le programme de ce congrès ?






P.L : Les sujets abordés s'inscrivent dans la continuité du travail réalisé lors du premier congrès, à Grenoble en 2019, mais depuis, le contexte a évolué et sur bien des aspects, la donne a changé. Les questions liées au changement climatique ont évidemment pris une place plus importante, comme celles impliquant le rôle et l'engagement de la FFCAM dans le milieu montagnard. Ce constat interroge la façon dont les pratiquants se forment et viennent à la montagne, la place de nos refuges, la cohabitation avec les autres acteurs du milieu, l'empreinte carbone de nos pratiques, et notre désir de voir perdurer les valeurs qui ont animé toutes les dynamiques positives des années écoulées. Comment préserver la notion d'engagement, lui redonner toute sa vigueur et faire vivre, dans ce nouveau contexte, ce qui est le moteur de la pratique de l'alpinisme et des sports de montagne ? se pose aussi la question de l'éthique, du déploiement d'une charte au sein de nos associations pour des pratiques plus exemplaires encore.
Parmi les autres sujets du programme, il faut aussi noter celui du bénévolat, et plus largement, celui de l'inclusion dans nos pratiques ; et aussi la question de notre positionnement par rapport aux JO 2024, alors que le Club alpin fêtera l'année prochaine ses 150 ans.
Enfin, si nous pouvons nous réjouir des bons indicateurs observés quant au développement de notre fédération (NDLR, la FFCAM franchit le seuil des 110 000 licenciés cette année), nous devons en toute lucidité poursuivre notre travail pour réunir les conditions permettant de rendre compatible le maintien de nos activités avec la préservation de la montagne. Sur tous ces points, nous devrons sans doute aller plus loin dans nos engagements et nos objectifs. A Pau ce sera le moment d'en discuter.
Pourquoi avoir choisi la ville de Pau pour ce deuxième congrès ?






© Fanny Vandecandelaere
P.L : Après Grenoble, où les clubs et les adhérents sont venus très nombreux, il nous est paru important d'être présent sur d'autres territoires. En France, le territoire montagne est vaste et riche de sa diversité, notre choix s'est ainsi porté tout naturellement sur les Pyrénées, à qui l'alpinisme et le monde de la montagne en général doit beaucoup. La ville de Pau, qui en est une des portes d'entrée emblématiques, a retenu toute notre attention les bénévoles locaux se montrant de plus très désireux d'accueillir l'événement. Les Pyrénées, c'est aussi le « pyrénéisme » ! Plus qu'une pratique sportive, c'est toute une approche de la montagne, une culture, une quête de symbiose avec la vie pastorale… des aspects qui sont justement à prendre en compte pour une montagne en transition. En participant au congrès nous envoyons à tous, au-delà de notre organisation, un témoignage de la bonne santé de notre vie associative. Les pyrénéens auront à cœur de nous accueillir dans les locaux de l'Université avec un programme alternant les échanges et des moments plus festifs et de partage. Le congrès de la FFCAM, c'est avant tout un rassemblement de montagnards.