On ne présente plus le Verdon, la Mecque de l'escalade en Grandes voies, le passage incontournable pour tout grimpeur

Il y a quelques années en arrière on aurait pu penser que les grandes pages de l’histoire de l’escalade au Verdon avaient été écrites. C’est peut-être vrai sur la falaise de l’escales mais c’était sans compter sur sa voisine d’en face. Située en rive gauche, la Ramirolle est devenue la falaise de référence pour les grandes voies de très hautes difficultés. Le style est à l’opposé des voies d’en face mais n’en demeure pas moins exigent. Il fallait donc s’y rendre et oser se confronter à ces monstres de continuité que sont «  La Ramirolle » ou encore « Hosanna » la tout dernière équipée par Patrice Glairon Rappaz.

Papy Ké Dévers / 150 m / 4 longueurs / 8a ; 7b ; 7c+ ; 6c

A l’origine, c’est une voie d’artif équipée en 1997 par Gilles Crespi et François Ranise. Elle sera ensuite après autorisation, rééquipé par Antoni Rhodes dans l’objectif de pouvoir y grimper en libre.

Se confronter à une voie aussi déversante d’un tel niveau était une première pour certain membre du groupe. Par sa difficulté et son profil, une voie de ce type nécessite une préparation optimale en termes d’organisation. Les réchappes peuvent devenir problématiques si l’on n’a pas tout optimisé à l’avance. Une expérience de plus accompli avec brio dans un élan de motivation sans faille.

Toutes les longueurs sont enchaînées en libre excepté la sortie de L3 qui à elle seule, demande d’être parfaitement à l’aise dans le style « ranfougne ».  Elle se compose d’une large fissure surplombée par un grand toit que l’on traverse de part en part. Dans ce genre de configuration on ne sait jamais trop comment avancer, en coinçant la tête, en  marche arrière les pieds en avant coincés dans la fissure….bref, tout un programme à étudier avec patience.

Le 2^ème objectif : Que dire…un peu « fou » !!

Le groupe excellence avec quelque première à son actif est toujours à la recherche de défis aventureux dans des voies non réalisées.

Celui-ci est de taille, il s’appelle « Hosanna ». Hosanna hosanna et en route pour la joie dises les paroles de ce titre de Noir désir.

Et le groupe alors, était-il « en route pour la joie » ?

Excepté dans sa première longueur, la voie n’avait jamais été grimpée. Dans ces conditions, la tâche est d’autant plus ardue. Il y a une première étape de « défrichage » qui consiste à brosser, repérer les passages, installer les dégaines, les cordes  statiques, monter le portaledge, etc…..dans des longueurs dont l’avancée dépasse parfois les 15m. Une préparation indispensable qui nécessite toute l’énergie d’une équipe qui a tout donnée durant ces quatre jours afin de faire vire ce monument.

L'histoire d'Hosanna

Vu du bas, cette voie impressionne et une fois dedans cela amplifie encore la perception de démesure

Les interrogations concernant l’équipement ou plutôt son auteur, se multiplient au fur et à mesure de l’avancée dans l’itinéraire. Disons plutôt, chaque fois que la ligne perpendiculaire au sol s’agrandie de 10 à 18 m entre chaque relais.

Comment est venu l’idée d’équiper une voie d’une telle ampleur, avec quel moyen, quelle technique ?

Patrice Glairon-Rappaz, l’auteur de ce chef d’œuvre nous raconte son histoire :

Premier contact avec la ramirole accompagné d'Antonin maitre des lieux et après un petit tour du proprio en règle mes yeux sont attirés par la partie droite de la falaise et je demande tout naturellement à Anto ‘il y a des voies dans ce secteur.

- Non rien me répond t'il.

Je lui indique une ligne assez évidente dans son ensemble et lui dit:

- Là, ya une grande voie incroyable qui pourrait passer on dirait...

- Oui c'est sûr qu'il y a un truc à faire mais c'est le gros chantier!!!!

Déjà les couennes c'est du job...alors là !

Cette ligne ne quittera plus mes pensées et au premier jour de repos je file en face à l'Eycharme pour jumeler tout ça. Antonin va sur Avignon faire le plein de spits.

Prends-moi en 200 tient lui dis-je ! Il comprend vite. Je retournerai quelques jours plus tard jumeler de nouveau.

Le soir la lumière est belle et je vois bien les colos, les trous...cette fois des doutes se lèvent les passages qui me paraissait fort lissent me paraissent plus prisus. J'ai finalisé ma ligne dans son ensemble et j'ai tout dans la tête.

Je décide d'aller voir ça...

Le premier jour je fixe une partie du bombé du haut et descend le plus bas possible en fil d'araignée sur ma corde. J'ai enfin une vue des passages clés et ça a l'air de passer. Je remonte euphorique. Au passage mes espoirs d'ouverture du bas s'envolent...c'est trop sale trop dur...trop. Et du haut ce sera déjà copieux.

S'en suivront 7 jours dans le gaz plaqué à mes deux crochets pour ne pas faire la saucisse tous les 2 mètres tellement c'est raide.

Non sans un certain engagement comme me l'a rappelé le jour ou descendant du haut sur ma corde avec une belle stat de 100m au cul j'arrive au R2 actuel, après des heures d'équipement, à bout d'accu, il est 20h, j'ai le dos en compote, je fixe ma 100m et l'envoie en bas...grand moment de solitude, elle est 10 mètres derrière la vire de la ramirole plein vide au-dessus du Verdon...

Je repasse tous mes fractios à la montée (un tous les 2/3 m!) Pour sortir sur le plateau rincé. Faudra que je repasse tous mes fractios à la descente encore une fois!

 "Hosanna" est, je pense, unique en son genre et je remercie le groupe FFCAM d'avoir eu le courage d'en défricher les longueurs.

En espérant que des grimpeurs enthousiastes et vaillants qui cherchent désespérément un projet à la hauteur de leur ambition suivent leurs traces et fassent vivre Hosanna.

Ils ne devraient pas être déçus !

Philippe Poulet rédacteur en chef de Vertical magazine nous informe qu'il travaille à la rédaction d'un numéro spéciale verdon

A cette occasion Philippe et Luc Thibal ont l’idée, pour des voies marquantes et historiques, de mettre en parallèle leur réalisation il y a 20 / 30 ans et maintenant.

Ce seront les membres du groupe excellence qui feront office de « grimpeurs contemporains ». Les plus anciens guideront les plus jeunes. 

Les voies réalisées sont d’un style que l’on qualifie dans le milieu de « Old School ». Et bien souvent il est dit que les « jeunes de maintenant » auraient plus de mal à les réaliser que leurs ainés. C’est peut-être vrai pour un grand nombre d’entre eux mais ce n’est pas le cas avec les très forts grimpeurs de la FFCAM. La preuve en est avec Mattéo SOULE qui, lors de ce stage, du haut de ses 13 ans réalisa la première en libre d’une longueur qui jusqu’à présent n’avait été réalisé qu’en artif.

Les voies essayées à cette occasion sont : « Take IT Or Leave It » ; « Surveiller et Punir » ; « Pichenibule », toutes situées sur la falaise de l’Escalès.

Les grimpeurs présents : Mattéo SOULE ; Titouan DECHAMBOUX ; Tanguy TOPIN ; Olivier FOUBET ; Yann GHESQUIERS ; François LOMBARD ; Pierre SOULE