Amaury Fouillade






Qui es-tu et d'où viens-tu ?
Je m'appelle Amaury Fouillade, et j'ai 23 ans. Je suis parisien d'origine et grenoblois depuis trois ans. Je suis en dernière année d'école d'ingénieur Génie Industriel à Grenoble INP.
Comment es-tu venu à la pratique de la montagne ?
J'ai commencé la montagne assez jeune avec mes parents, et une de mes tantes qui habite en Suisse. Je faisais surtout de la randonnée, de l'escalade et du ski. Avec mes parents l'été on ne partais pas à la mer, on allait à la montagne ! On a fait beaucoup de treks, au Ladakh en Inde, au Pérou… Mais bon la randonnée c'était cool, mais j'avais envie de plus ! C'est l'escalade qui m'a fait lever les yeux vers les sommets… Au début, j'ai appris l'alpinisme en autodidacte : j'avais lu beaucoup de livres de montagne, donc je savais faire ! Mais en vérité pas du tout, et je me suis juste mis en danger. Vers 15/16 ans, j'ai fait un stage avec l'UCPA qui m'a formé et amené vers l'autonomie. Par la suite, on partait souvent depuis Paris avec des amis pour aller en montagne grimper.
Quel est ton sport de prédilection ?
Je dirais que ça varie à l'échelle d'une saison. Par exemple, il y a deux ans j'ai fait une grosse saison de pente raide. C'était un peu ma manière de dessiner de belles lignes sur les montagnes. Cet hiver, j'ai préféré faire du mixte dans les faces nord des Alpes. Et en été, ce que j'aime, c'est de combiner des courses d'alpinismes pour rallonger les arrêtes. Mais finalement, c'est surtout ce qui est en condition me fera toujours plaisir : grimper au soleil dans le sud, réaliser une jolie course d'arrête ou faire du « trad » (des voies où les grimpeurs progressent en se protégeant grâce à des friends et des coinceurs).
En as-tu une pratique professionnelle, ou envisages-tu d'en faire ton métier ?
J'aimerais devenir guide. J'ai passé l'examen probatoire cet hiver et j'ai loupé l'épreuve de ski mais je compte bien y retourner l'année prochaine ! Je me suis un peu mis la pression pour réussir cette année alors que j'étais encore en étude, mais finalement j'aurais plus de temps de me préparer l'année prochaine. De toute manière, je ne compte pas travailler en ingénieur, c'est certain : je serais guide à plein temps !
Qu'est-ce qui t'as poussé à intégrer le GEAN ?
Au début je ne connaissais pas trop, mais c'est ma copine actuelle qui était dans l'ancienne promotion qui m'a fait découvrir le groupe. J'ai trouvé ça génial, et c'est elle qui m'a motivé pour y rentrer !
Quelles sont tes plus belles réalisations en montagne ?
Cet automne, j'ai fait la voie Schmitt en face Nord du Cervin, c'est une belle réalisation mais ce n'est pas celle qui m'a le plus marquée, car elle s'est bien déroulée.
Mais une fois, j'ai fait une voie en face Nord des Grandes-Jorasses, et à la sortie, en allant vers le bivouac, on a été pris dans le mauvais temps. La redescente du glacier du Mont Mallet était difficile : on était dans la tempête, il y avait un brouillard à couper au couteau, et c'était en octobre donc il fallait qu'on évite les crevasses pas encore rebouchées par la neige. En plus de ça, ma compagnonne de cordée faisait un début de MAM (Mal Aigu des Montagnes) et vomissait régulièrement. Heureusement, cette aventure c'est bien fini, mais ça a été un sacré coup dur.
Et celles que tu rêverais réaliser ?
Il y en a pleins ! Déjà il y a des rêves à court terme, par exemple dans le mont-Blanc le « Grand Pilier d'Angle » en face Sud. Maintenant, ça me parait accessible, alors qu'avant c'était le rêve d'une vie ! Et pour des projets à plus long terme : j'aimerais faire des voies à l'étranger. J'aimerais bien réaliser l'ascension de la face Sud de l'Annapurna. Je ne sais pas si c'est réaliste, mais il est permis de rêver !
As-tu une personnalité que tu admires ? Une personne a qui tu dois beaucoup ?
Il y a des alpinistes qui m'ont inspiré, comme Ueli Steck ou David Cana. Il y a aussi un alpiniste auquel je m'identifie beaucoup : Pierre Beghin. Il est parisien aussi, il a beaucoup grimpé à Fontainebleau avant de venir s'installer à Grenoble et de faire une thèse sur les avalanches, il est mort en gravissant la face Sud de l'Annapurna.
Il y a aussi Stéphane Mouty, un DE escalade de la salle ou je grimpais beaucoup à Paris. C'est un peu mon mentor car il était passionné de grande-voie dure, et dès qu'un jeune était un peu motivé, il le prenait avec lui. J'ai fait ma première grande-voie à 14 ans avec lui, on a grimpé ensemble en Grèce et au Maroc. C'est un peu lui qui m'a boosté pour partir de Paris.
Une anecdote croustillante d'une aventure en montagne à raconter ?
Il y a une histoire qui m'a marquée, c'est une mésaventure qui heureusement finit bien, mais elle m'a fait réfléchir à ma manière d'aborder la montagne.
Un jour, j'ai rejoint un ami à Chamonix, dans le but de faire une goulotte. Elle n'était pas très dure, mais le temps était vraiment mauvais. On décide d'y aller quand même, malgré le risque 4 d'avalanche et le mauvais temps annoncé ce jour-là. On s'est dit « ça va être la guerre », mais on trouvait ça cool de se confronter aux éléments. On arrive au pied de la goulotte, et alors qu'on était encordés, prêt au départ, je m'enfonce dans de la neige poudreuse au moment du passage de la rimaye. En essayant de me débattre, je fais partir la plaque et je suis emporté dans l'avalanche. Heureusement la corde c'est tendu et m'a retenu. J'ai quand même eu l'impression d'être passé dans le tambour d'une machine à laver.
Finalement, nous sommes rentrés sains et saufs, le visage brulé par le froid, mais c'était une leçon.