Charly, gardien du refuge de Rabuons

Quel est ton parcours avant d'être gardien du refuge de Rabuons ?

Né à Reims, je ne suis pas du tout montagnard de souche et devenir gardien de refuge n'a jamais été un objectif pour moi. J'ai toujours aimé la nature mais je ne connaissais pas du tout le milieu de la montagne. Avant d'arriver dans les Alpes Maritimes, je n'avais jamais skié ni fait d'escalade.

Après un DUT en Génie mécanique, j'ai été embauché dans un bureau d'études travaillant pour l'industrie automobile. Après 5 ans dans ce bureau, j'ai tout plaqué pour partir voyager. Je n'avais pas vraiment d'objectif ni de point de chute et j'ai suivi un ami dans les Alpes Maritimes. J'ai alors découvert le Mercantour et suis devenu en 2009, un peu par hasard, aide gardien, au refuge de Nice. Avant cela je n'avais jamais mis les pieds en refuge !

En 2012 j'ai suivi la formation de gardien de refuge et en 2013 je suis devenu gardien de la Cougourde l'hiver. J'ai alors été confronté à la montagne « pour de vrai » !

Je n'avais aucune connaissance en matière de montagne et pour pouvoir répondre aux questions des guides et des clients sur les conditions, j'ai appris sur le tas en prenant mes skis et en parcourant le massif mais aussi en écoutant les gens. Aujourd'hui grâce à cette découverte en solitaire du massif, je le connais par cœur !

J'ai continué à travailler au refuge de Nice l'été jusqu'à ce printemps de 2015 où, je suis devenu, quelques jours seulement avant le premier héliportage, gardien du refuge du Lac de Rabuons.

Qu'est-ce que tu aimes particulièrement dans ce métier ?

En premier lieu j'aime la nature, l'environnement qui m'entoure et le calme qui y règne.

J'aime aussi partager avec les gens. C'est pourquoi, garder ce petit refuge me convient bien car il me permet d'avoir le temps de discuter avec les clients et de répondre à leur attente de convivialité.

Quelle est la particularité du refuge de Rabuons ?

Le refuge du lac de Rabuons est situé en dehors du Parc National du Mercantour. Il est posé sur un verrou glaciaire et il surplombe le lac du même nom qui est le plus grand lac naturel des Alpes Maritimes.

Ce n'est pas un refuge d'alpinistes mais plutôt de randonneurs, de pêcheurs ou encore de vététistes arrivant depuis le Chemin de l'énergie. Il y a aussi beaucoup d'habitués et de nombreux habitants du village de St Etienne de Tinée aiment y venir. Il existe un lien important entre ce refuge historique et le village.

Le Rabuons c'est aussi ce que j'appellerais un « vrai refuge » parce qu'il constitue une réelle étape sur un parcours. On y vient rarement pour un aller-retour à la journée. Les clients viennent au refuge pour y faire quelque chose : la pêche, le sommet du Ténibre ou se reposer avant de poursuivre leur route, sur le tour du Ténibre, la Grande Traversée du Mercantour ou encore vers le refuge de Vens.

Comment s'organisent l'accueil et l'hébergement dans le refuge ?

Le refuge est très petit et c'est donc la terrasse plein Sud, qui offre une vue superbe et de magnifiques couchés de soleil, qui en est le véritable lieu de vie.

La pièce commune avec son poêle à bois sert de salle à manger et de lieu de vie en cas de mauvais temps. Ces deux espaces donnant directement sur la cuisine, je suis toujours proche des clients ce qui participe pleinement à la convivialité du refuge.

Le sas d'entrée permet de stocker les chaussures, les sacs et les affaires mouillées mais sert aussi de salle hors sac.

Le couchage est réparti dans deux dortoirs de 20 et 16 places équipés de bas-flancs séparés par de petites cloisons en bois. Il y a malgré tout suffisamment d'espace dans le dortoir pour pouvoir y poser quelques affaires.

Les sanitaires et la douche (avec eau chaude !) se trouvent à l'extérieur ce qui permet de profiter pleinement de la vue.

Les horaires des repas :

Petit déjeuner entre 7h et 8h

Midi entre 12h et 14h

Dîner entre 19h et 20h30

L'extinction des lumières se fait à 22h pour respecter au mieux le sommeil de ceux qui souhaitent se lever de bonne heure.

Dans ce petit refuge jouissant d'un climat favorable c'est à l'extérieur qu'on vit !

Qu'est-ce que tu proposes en restauration ?

Une cuisine simple mais bonne !

Je propose un petit déjeuner Français avec pain, biscottes, pain d'épices, céréales, beurre, confiture et boissons chaudes.

Le midi vous pourrez déguster des omelettes, des pâtes ou un plat du jour (souvent une viande en sauce) mais aussi une tarte ou un gâteau accompagné de boissons fraiches dont les bières d'Isola village.

Le repas du soir est composé d'un potage de légumes, d'une viande en sauce ou de lasagnes, de fromage et d'un dessert, généralement un gâteau.

Le pique-nique proposé est composé d'un cake aux légumes accompagné d'un œuf dur, de gressins et de fromage.

Il n'y a pas de planning pour les menus, je les adapte selon le nombre de personnes présentes et les éventuels régimes alimentaires spécifiques.

Est-ce que tu proposes des produits bio/locaux ?

Il n'y a pas beaucoup de producteurs dans les environs mais je m'attache à acheter les produits chez les commerçants des environs plutôt que chez les grossistes Niçois. Ainsi les légumes sont achetés dans la vallée, tandis que la viande vient de la boucherie de Roquebillière (dans la voisine vallée de la Vésubie). Le fromage vient de Barcelonnette (dans la vallée de l'Ubaye), les bières d'Isola village et les confitures seront bientôt « maison ».

Quelle est la spécialité du refuge du Rabuons ?

Je n'ai pas de plat fétiche. J'aime bien tout cuisiner mais les clients apprécient particulièrement la daube provençale et les habitués viennent souvent se régaler de la tarte amandine aux myrtilles.

As-tu des indications sur l'histoire du bâtiment ?

Le refuge de Rabuons date de 1905 et était un lieu prisé de l'aristocratie niçoise. A cette époque étaient même organisées des courses de bateaux sur le Lac de Rabuons. Les bateaux devaient alors être montés sur les 1400 mètres de dénivelé menant jusqu'au refuge !

Ce refuge construit en pierres et en bois est resté pour ainsi dire tel quel ce qui lui confère tout son charme et ravi les clients.

Comment fonctionne le refuge au niveau énergie, eau et gestion des déchets ?

Il n'y a que peu d'électricité disponible au refuge du fait de l'alimentation par panneaux solaires ce qui demande une gestion rigoureuse. S'il y a du soleil alors aucun souci ! Mais dès qu'il y a plus de deux jours de mauvais temps les choses se compliquent. Le plus gros consommateur du refuge c'est le congélateur ! Les approvisionnements se faisant une fois par mois par héliportage, sans congélateur il est impossible de cuisiner même si de nombreux clients se proposent de me monter des produits frais.

L'eau du refuge provient d'une source située à environ 400 mètres (qui n'a malheureusement pas coulé ce printemps) et lorsqu'elle ne coule plus, il faut tirer des tuyaux jusqu'au captage d'eau qui se situe à 2 kilomètres voire plus au fil de la saison…

Les clients ont, jusqu'à présent, toujours eu accès à l'eau courante et à la douche (dont l'eau chauffe naturellement dans le tuyau d'approvisionnement) mais il reste important de les sensibiliser à la préservation de cette ressource.

Le refuge étant petit, il n'y a pas beaucoup d'espace pour stocker les déchets qui ne sont redescendus qu'une fois par mois lors de l'héliportage. Les clients sont donc priés de redescendre leurs détritus. Ce peu d'espace oblige également à limiter les quantités de déchets montés au refuge et à faire des choix lors des achats de provisions.

Quels sont les bons plans à proximité du refuge ?

Les activités et itinéraires aux abords du refuge sont variés.

Le classique Chemin de l'énergie peut être parcouru à pied ou à vélo puisque nous ne sommes pas dans le Parc. Les deux sommets à 3000 du Mont Ténibre (3031 m) et du Corborant (3007 m) ne sont plus qu'à 500 mètres de dénivelé !

Les grimpeurs pourront profiter du « site école » situé au bout du cirque (30 minutes de marche) ou des courses d'arrête parcourant les crêtes frontalières.

Les pêcheurs et autres contemplatifs pourront admirer le lac et découvrir les nombreux saxifrages (plantes de rocaille) qui poussent dans les environs.

Enfin, le soir venu nous pourrons partager l'apéro sur la terrasse et observer les nombreux mouflons qui vivent aux alentours du refuge.

As-tu de petits conseils à donner aux clients ?

Si les journées sont chaudes penser tout de même à prévoir dans votre sac des vêtements chauds et une veste car à 2500m d'altitude les soirées restent fraiches et les changements de temps peuvent être imprévisibles. Des couvertures sont disponibles au refuge mais n'oublier pas de prendre votre « sac à viande ».

Les sanitaires étant situés à l'extérieur (des petites lampes solaires indiquent le chemin) mais une lampe frontale peut s'avérer utile.

Il y a du réseau téléphonique mais il n'est pas possible de recharger les appareils.

C'est un petit refuge isolé et convivial et je souhaite garder cet esprit de refuge calme et à taille humaine. Je tiens donc à ce qu'on respecte l'extinction des feux à 22h.

Il n'y a pas de troupeaux à proximité et donc pas de patous.

Quelles sont les animations que tu proposes ?

Je ne propose pas d'animation en soirée pour ne pas imposer de dérangement aux clients qui sont au refuge pour se reposer avant de faire un sommet ou de reprendre leur circuit de randonnée.

Cependant, avec les agents du Parc nous proposons de petites interventions de sensibilisation (patous, faune, flore) mais plutôt en fin de journée au moment de l'apéro pour un moment d'échange et de convivialité.

Le programme sera mis à jour sur le Facebook ainsi que sur le site du refuge.