Décès de Fred "Titi" Gentet, guide et ancien coach du GEAN






Guide, professeur à l'ENSA, Frédéric Gentet, dit "Titi" est décédé accidentellement mardi dernier en Grèce, sur le site d'escalade de Léonidio, suite à la chute d'un éclat de roche. Titi est une figure de l'alpinisme français : passé par le groupe Excellence alpinisme de la FFCAM, il en a aussi été coach pendant 15 ans sous la houlette de Christophe Moulin. Très fort grimpeur (il prévoyait le 8c pour ses 50 ans), il a aussi réalisé de belles performances dans le massif du mont Blanc (première en libre de la voie Manitua dans les Grandes Jorasses) et surtout lors de ses expéditions, notamment lorsqu'il était membre du GMHM (groupe militaire de haute montagne) : on retiendra en particulier la seconde ascension de l’arête Est du Shivling (6543 m), en mai 1999 avec Antoine De Choudens. Avec son ami Christophe Moulin, qui lui dédie le texte ci-dessous, c'est l'ensemble de la FFCAM et de la montagne française qui lui rend un vibrant hommage.
TITI
Le génie d’un Comici, le talent d’un Jeff Lowe, l’endurance d’un Pierre Gignoux résumeraient assez le profil de Titi Gentet… Et si on ajoute à cela le niveau de ski, on obtient un personnage à l’éventail jamais égalé dans l’histoire de l’alpinisme.
Combien d’alpinistes ou de grimpeurs peuvent afficher la même liste de courses ? Je n’en connais aucun.
Combien d’alpinistes ou de grimpeurs pourraient recevoir de sa part une leçon d’humilité ? Je dirais tous.
Etre prêt à jaillir et à faire des milliers de kilomètres si besoin pour saisir l’instant et faire la croix. Telle était sa philosophie de vie. Et s’il butait dans une voie, un jour où l’autre il revenait terminer le travail. « Find the limits and push them ! » : combien de fois l’ai-je entendu prononcer cette phrase avec un sourire malicieux.






Durant 15 ans nous avons guidé, encadré, coaché aux quatre coins du monde les jeunes du Groupe Excellence Alpinisme National de la FFCAM. Avec Pat Pessi, nous avons formé un trio de coachs presque parfait et je n’ai pas le souvenir d’un différend entre nous. Je n’avais de cesse de vouloir peaufiner, améliorer, remettre en question nos méthodes et notre fonctionnement. Pat était le pilier solide sur qui je pouvais m’appuyer et agrémentait le tout de son humour pince-sans-rire au cyanure, et Titi embrayait à chaque fois apportant la touche de plus ou le petit détail supplémentaire qui ponctuait brillamment l’idée. On établissait toujours des contenus précis avec des journées de repos bien programmées et évidemment, on ne les respectait jamais. « On n’a pas fait autant de kilomètres pour se reposer » : avec Titi, pas question de chômer ; « le repos…, pu y voir ! Pu y sentir ! » criait-il en imitant le bon accent haut-savoyard.






Lorsque j’ai décidé d’arrêter le GEAN en 2016, Titi m’a aussitôt suivi même s’il avait encore largement le niveau pour encadrer des années. « Place aux jeunes » disait-il en riant avec sa tête de gamin… Grâce à nous, beaucoup de jeunes devenus guides avaient atteint le niveau et la maturité pour nous remplacer et le temps était venu de leur laisser la place. Pour Titi, pédagogue hors pair, passer le relais était aussi une raison de vivre.
Je l’ai vu grandir, j’ai constaté la facilité déconcertante avec laquelle il a franchi tous les paliers pour atteindre le plus haut niveau, je l’ai vu au-dessus de tout le monde sans jamais se mettre en avant.
Il était un peu comme un petit frère.
Il était évidemment immortel.
Sa disparition est une torture
Christophe Moulin
Ensemble avec le GEAN, nous avons encadré :
• 5 voyages en cascade de glace (Pologne, Canada, Islande, deux fois en Norvège)
• 5 expéditions (Pamir Alaï, Inde Garwal, 3 fois en Alaska)