Une première en solo hivernal aux Grandes Jorasses

Charles Dubouloz au retour Chamlang

Charles Dubouloz a gravi en solitaire la voie "Rolling Stones", du 13 a 18 janvier dernier.

Voici une ascension qui marquera les annales de l’alpinisme, et qui place le guide annecien de 32 ans parmi ses illustres aïeuls des grandes faces nord en hivernal. Charles Dubouloz a passé pas moins de 6 jours et 5 nuits sans voir le moindre rayon de soleil, pour gravir la voie "Rolling Stone" jusqu’à l’éperon Walker (4208m), point culminant des Grandes Jorasses.

Très peu répétée, cette voie a été ouverte en 1979 par les slovaques Kutil, Prochaska, Slechta, Svedja, et cote ED+ 6a A2 M8 pour 40 longueurs sur 1100m de paroi. C’est évidemment la première fois qu’elle est gravie en solo, ce qui nécessite des compétences, un effort et un engagement supplémentaire : pas moins de 35kg de matériel ont été hissés par Charles au fur et à mesure de son ascension ! C’est un exploit peu ordinaire, à l’heure où la mode est plutôt aux ascensions rapides, qui concrétise un parcours imposant et une préparation sans faille : Charles avait déjà "sévi" l’an passé en hivernale aux Drus, mais aussi cet automne lors de son ascension au Chamlang (Népal) avec Benjamin Védrines.

La FFCAM est particulièrement fière de saluer cette prouesse, car Charles a été formé notamment dans les filières de haut niveau de ski alpinisme sous la conduite du regretté Stéphane Brosse, ce qui a contribué à forger son excellente condition physique indispensable à un tel projet. « Charles est devenu en quelques années un des alpinistes français les plus talentueux grâce à une détermination sans faille, une grande intelligence, et une excellente maîtrise technique », confie Luc Thibal, Directeur Technique National de la FFCAM. Et il conclue dans le SMS qu’il a envoyé à Charles pour le féliciter : "le chemin de l’excellence n’est pas un long fleuve tranquille… Grâce à ta détermination, Charles, ça a fini par matcher !".

Le solo en auto-assurage, qu'est-ce que c'est ?

Il existe deux types d’escalade dite en solo, celle du « solo intégral », qui consiste à évoluer sans corde, donc avec un engagement absolu et total (on pense à Alex Honnold), et celle du solo en auto-assurage. Sans entrer dans des détails approfondis, le principe consiste à grimper deux fois la longueur, la première fois « en tête » en s’assurant depuis le bas au moyen d’un appareil autobloquant. Une fois arrivé au point ou au relais (il existe différentes méthodes, selon aussi la configuration de la longueur), on fixe la corde, ce qui permet de redescendre en rappel, récupérer le matériel (il n’y a pas de second de cordée pour le faire !), puis remonter en s’assurant cette fois-ci par le haut, toujours avec la technique autobloquante. Souvent, le grimpeur remonte au moyen d’une poignée jumar pour gagner du temps.

Peu de grimpeurs se lancent dans ce type d’ascension, qui est à la fois plus technique, plus long, et plus engagé (il n’existe d’ailleurs pas ou peu de matériel spécifique)… l’escalade en cordée est bien entendu la pratique la plus sécuritaire ! Quelques grands spécialistes s’y sont illustrés, comme Christophe Moulin, Lionel Daudet, Patrice Glairon-Rappaz, ou plus récemment Silvia Vidal ou Julia Virat au Yosémite.